Alors ! me dit la dame assise à côté de moi sur le bateau, ça va ? Vous n' aviez pas vu cette grosse branche en travers, et ne vous étiez pas aplatie assez vite !
Eh non ! Et je me suis assommée à moitié. Le temps d' une ou deux divagations sans doute; je me connais. Mais, à partir de maintenant, je vais faire attention et profiter de cette balade; car elle nous réserve encore de bien belles surprises.
Et pour moi, les plus belles sont le chatoiement des couleurs de l' eau et leur lumière.
Les tons de vert sont infinis,
Par endroit, épicés de jaune.
C' est une palette miroitante. On a l' impression que les couleurs sont tombées au hasard, se diluant sans se mélanger.
Parfois, des flaques d' argent tombent et s' y brisent.
Cet univers aquatique est un leurre où le ciel et l' eau se mélangent pour nous entraîner dans un monde d' illusions.
Un monde impressionniste qui montre sa brisure,
Et qui soudain, ressemble à l' entrée du monde magique des vivants.
Ici, la forêt s' éclaircit, devient plus humaine;
Là, le vert reprend sa royauté, et règne sans partage, du plus clair au plus profond.
Plus loin, l' eau, en les noyant, pare les arbres morts d' une redoutable beauté.
Et, soudain, parfaitement inattendue, une explosion florale. Des hibiscus des marais font éclater leurs corolles roses.
Ils jaillissent d' herbes folles qui envahissent un petit cap, que nous allons contourner pour prendre un autre bras du fleuve.
Celui-ci s' ouvre, aussi mystérieux et enchevêtré que le précédent.
Un cyprès chauve de Louisiane, flanqué de ses racines aériennes !!! Que fait'il ici ? Si loin des bayous ?
Nous en voyons d' autres, exhibant leurs racines.
Nous traversons un étang de safran dilué dans de l' or vert liquide.
Des sentinelles des deux mondes se dressent devant nous.
Certains décors font vraiment penser à des tableaux impressionnistes.
Cette Amazone des Landes se nomme " Courant de Huchet ". Nous allons bientôt en sortir pour rejoindre le lac de Léon. J' espère qu' il vous plaira autant qu' à moi.
Alors, à bientôt !