D' abord, il y a eu le brouillard, quand la Nationale 113 frôlait de trop près la Garonne, puis, sous le ciel clair retrouvé, les petites routes sinueuses du Réolais.
Je profitais de la visite à des amis, dans l' Entre-Deux-Mers, pour aller un peu plus loin, à Sigalens, petite bourgade aux confins orientaux de la Gironde, et plus précisément au lieu-dit Monclaris, où se situent une vieille église et son mini-cimetière, inscrits l' une et l' autre aux Monuments Historiques depuis mille neuf cent quatre vingt sept.
Après que mon GPS ait tenté une nouvelle fois de me perdre, la vieille église m' est apparue, juchée sur sa butte.
Elle a été construite entre les XIIIème et XIVème siècles. Restaurée deux fois, vers mille six cent quatre vingt et mille huit cent vingt deux, il semble qu' elle ait été abandonnée à son triste sort, après la mort de son dernier curé en mille huit cent trente trois, et la construction au XVIIIème siècle, d' une autre église à un peu plus de trois kilomètres de là.
Cette vieille église abandonnée se nomme Saint Martin de Monclaris. Sa nef s' est effondrée; par une ouverture mal refermée, dans le mur latéral, j' ai pu apercevoir l' état de dénuement total de l' intérieur.
A l' avant du bâtiment, un clocher pignon sur lequel se trouve le portail d' entrée, fermé bien sûr, sous un auvent de bois qui n' est sûrement pas d' origine.
En arrière, au centre du corps de l' église, un deuxième clocher, triangulaire, comme pour beaucoup d' églises anciennes de la région.
Selon l' antique tradition, un mini-cimetière jouxte cette église. Celui-ci aussi est abandonné. Quelques stèles subsistent, la plupart cassées et rendues moussues par le temps.
Une autre, plus imposante, à moitié mangée par la végétation, et à la pierre rongée par les années.
J' éprouvais une sorte de sentiment de profanation en pensant que je marchais sur des corps enfouis sous mes pieds.
Mais c' est une autre stèle qui est une curiosité de ce cimetière lilliputien : celle où repose le sieur Bertrand François Castéra.
Qu' avait donc de particulier cet homme, mort presque centenaire à quatre vingt dix huit ans, en mille huit cent trente trois ?
Non seulement il fut le dernier curé de Saint Martin de Monclaris, mais, et surtout, il fut aumônier à la cour de Louis XVI.
Je n' ai trouvé aucune indication sur lui, alors, fidèle à cette imagination que je déployais quand je n' avais pas appris mes leçons, qui me valait les félicitations du prof qui m' interrogeait..........assorties d' un zéro et de trois heures de colle, j' ai pensé qu' il avait du fuir au moment de la Révolution, quand on avait la décapitation facile, et qu' il était venu se planquer, loin de Paris, dans sa probable région d' origine, car Castéra est un nom qui fleure bon la Gironde, et le Sud-Ouest en général.
SIC TRANSIT GLORIA MUNDI
Sur ce, je suis repartie, car j' étais invitée à manger l' omelette-gâteau d' Eliane dont je vous avais parlé et donné la recette en bonus, il y a deux, trois ou quatre ans.
Un petit mot quand même sur Sigalens. Ce nom vient de " Situs Alanorum " ce qui signifie " lieu des Alains ". Ceux-ci étaient un peuple scythe venu du Caucase. A-t-on vu un jour, débouler en Gironde, une horde de ces effrayants cavaliers cataphractaires, terrorisant nos ancêtres !
Au fil du temps, le nom initial se transforma en " Sit Alanus ", et, les Romains partis, en " Sig Alens " et finalement en Sigalens, qui est aussi le nom gascon.
A bientôt !