Ce n' est pas si souvent que je quitte mes arbres, qu' un vent salé fait frissonner, les chants des oiseaux qui y vivent, et les crépuscules bleu et or pour aller me balader à Bordeaux. Pourtant, j' aime cette ville dans sa magnificence. Mais dernièrement, j' y suis allée à deux reprises, et les deux fois un samedi.
La première fois, c' était il y a déjà quelques semaines, et un air d' été s' y attardait encore. Je faisais visiter la ville au vieil ami retrouvé.
La fontaine des Trois Grâces coulait en rose. Nous étions encore dans le mois dédié à la lutte contre le cancer du sein.
De là, nous sommes partis au XVème siècle, vers les vieilles rues du quartier Saint Pierre.
On y voit de belles demeures avec leurs fenêtres à meneaux.
Des rues tranquilles, comme des déambulatoires;
L'angle des maisons révèle parfois quelques surprises; ainsi, à l' angle des rues du Cancera et des Bahutiers se trouve une petite statue de Saint Pierre dans une très ancienne niche.
Cette maison présente un autre intérêt : c' est là, qu' en mille huit cent quarante quatre mourut Flora Tristan. Elle vivait au XIXème siècle qui fut l' un des plus misogyne de l' Histoire. Le code Napoléon imposait aux femmes de très lourdes contraintes, et rares furent celles qui, à l' instar de Georges Sand, ont osé braver l' opinion pour affirmer leur indépendance et leur droit à l' autonomie. Flora Tristan fut de celles-là.
D' origine franco-péruvienne, elle disait descendre de l' empereur Moctezuma II. C' est en voulant rejoindre le Pérou en passant par Bordeaux où elle devait embarquer, qu' elle contracta la typhoïde et mourut dans cette maison.
Pionnière de la cause féministe, elle participa aussi à la lutte des classes aux côtés de Proudhon. Parmi ses descendants, son petit-fils......Paul Gauguin.
Mais revenons dans la rue du Cancera. Son nom n' a rien à voir avec le cancer.
Au temps de Burdigala, cette rue bordait le port romain qu' elle surplombait. A l' entrée du port ou "cancellarius" - d' où après moult transformations elle tire son nom - se trouvait une grande statue de bronze représentant Hercule. Celle-ci, après quelques siècles passés à dormir dans la vase, fut retrouvée en mille huit cent trente deux, et se trouve au musée d' Aquitaine.
Nous tombons tout à coup en arrêt devant une autre surprise : une maison, dont la porte et les fenêtres à moucharabieh, nous transportent sans coup férir vers l' Orient mystérieux.
Même si elle n' est pas la seule à Bordeaux à se donner une allure sarrazine, que fait-elle là ? Pour l' instant, je n' ai pas de réponse.
Plus loin, isolé sur un pan de mur nu, un visage surgi de la pierre, tire la langue au passé négrier de la ville.
Cette promenade, dans le premier des deux samedis, va s' arrêter là.
Je vous invite à me suivre pour la deuxième.........bientôt !