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2019-12-16T18:48:28+01:00

Déflagration

Publié par divagations-et-balades

          C'est celle que j'avais provoquée en racontant cette histoire, alors que l'on attendait un exposé médical. J'ai travaillé quelque temps dans l'industrie pharmaceutique, avant de la quitter avec fracas un lundi matin, en disant "trouvez quelqu'un d'autre pour la conférence à Toulouse ce soir, je démissionne". On voulait que je dise des choses sur lesquelles je n'étais pas d'accord, et c'est comme ça que j'ai eu 8 mois de galère, obligée de quitter mon appartement, vendre ma voiture etc...

          Mais là n'est pas la question; avec mes quatre confrères, on nous avait emmenés faire un stage à Viroflay, dans une entreprise qui apprenait aux hommes politiques et autres acteurs à bien manager un discours en public. A la fin du stage, le ....professeur avait demandé un volontaire pour faire une conférence. Mutité totale des confrères, alors je me suis portée volontaire. J'avais jusqu'au lendemain pour préparer mon sujet. Et à la stupeur générale et l'ire du directeur médical, voici ce que j'ai raconté :

          " Je voudrais vous raconter une histoire, une histoire simple de vie et de mort, avec peut-être quelque chose en plus, le filigrane d'une condamnation.

          Il y a bien longtemps, dans les terres de feu et de glace de l'Arizona, vivait un étrange peuple. Il habitait dans d'inaccessibles demeures creusées à même la montagne, pour se protéger d'animaux immenses et féroces, et peut-être aussi d'ennemis inconnus.

Déflagration

          Ceci dura bien des années, et, brusquement, en l'espace de quelques lunes, ce peuple disparut. Tout le monde partit, et personne, jamais, n'a su pourquoi, ni pour où. Ces hommes ont laissé, gravés dans la pierre, des messages que personne, jamais, n'a su déchiffrer. Ils étaient sans doute les premiers Américains, ceux que les Indiens actuels appellent Les Grands Ancêtres.

          Ils se nommaient Les Anasasis.

         Bien des années après, d'autres hommes surgirent et occupèrent les grandes plaines et les montagnes de l'ouest. Etaient-ils la résurrection des premiers ? Ils ressemblaient à leur terre, rouges, comme elle, farouches et plein de chaleur, comme elle, et faisant comme elle, jaillir vers le ciel et l'Esprit qui l'habite, des élans venus du plus profond d'eux-mêmes.

Déflagration

          Pendant des siècles, ils vécurent libres dans ces vastes territoires qu'ils s'étaient partagés. Puis, se levèrent les jours du mal et survint l'homme blanc et son besoin de conquête, conquête des terres, mais aussi conquête des âmes.

          Ils enfermaient leur dieu dans d'orgueilleuses demeures et voulurent obliger le Grand Esprit à s'incliner devant un dieu étranger, car personne ne savait que c'était le même.

          Les flèches ne pouvaient pas grand'chose contre les boulets, et l'attrait des richesses indiennes était trop puissant.

          Le temps passa. Puis, d'autres hommes vinrent des rives orientales. Ils avaient entendu parler de l'or des eldorados de l'ouest. Alors, ils attelèrent leurs chevaux, chargèrent leurs chariots, et commencèrent à disputer aux Indiens, leurs terres et leur subsistance.

          Souvent, le voyage tournait court, et il ne restait de leurs espoirs et de leur ambition, qu'un chariot, abandonné au temps.

          Mais il en vint d'autres, et d'autres encore. Ils construisirent des forts, puis des villes.

Déflagration

          Alors s'éleva le chant des guerres indiennes et il exprimait cette folie messianique qu'eurent les Hommes Rouges désespérés de la fin du XIXème siècle . Mais il n'était que le rêve d'un peuple mort dans la neige ensanglantée de Wounded Knee au soir tragique du vingt neuf décembre mille huit cent quatre vingt dix.

          Maintenant que reste-t'il de ces fiers guerriers, de ces braves aux longues chevelures qui galopaient dans le grand vent de liberté de la prairie ? Le petit-fils de Géronimo pose pour les touristes à Old Tucson, paré des plumes dérisoires des sachems disparus. Les Navajos cachent leurs hogans au fond fertile des canyons brûlés du désert,

Déflagration

et leurs femmes gardent de maigres troupeaux, ou vendent des colliers de turquoise sur les trottoirs du vieil Albuquerque.

          Mais peut-on tuer à jamais l'âme d'un peuple ? Les bisons sont-ils seuls à garder, à l'arrière de leur front têtu et résigné, la nostalgie des équipées sauvages et du temps de la liberté ? Non, l'âme indienne n'est pas morte, tous les ans, les tribus se rassemblent pour revivre l'ancienne civilisation, même si ce rassemblement a pour témoins curieux et seulement préoccupés de folklore, les descendants de ces Hommes Blancs qui les dépouillèrent.

          Et, si certain soir du mois d'août, aux confins des terres rouges de l'ouest, on peut entendre encore le chant de la Princesse Cheyenne, il ne cache pas que résonne encore sur Harney Peak, la prière désespérée d'un vieil Indien qui pleurait dans la bruine et qui criait aux Grands Pères de l'Univers : " Vous me voyez là, un homme pitoyable, écrasé, et qui n'a rien fait."

          Ce vieil homme, c'était Elan Noir, petit cousin de Crazy Horse, et dernier survivant de Wounded Knee.

Cette photo de l'authentique Elan Noir est tiré du livre "Elan Noir, mémoires d'un Sioux" de J. Neidhart

Cette photo de l'authentique Elan Noir est tiré du livre "Elan Noir, mémoires d'un Sioux" de J. Neidhart

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commentaires
K
je ne comprends pas bien les tenants et les aboutissants de cette histoire, ni le rapport entre ce récit et ta position dans ce laboratoire, la raison de ta démissions ....
Répondre
S
la raison de ma démission, je l'ai donnée, et j'ai eu raison puisque le médicament (ticlid) a été interdit plus tard., mais c'est juste pour situer le moment de l'histoire, on attendait un exposé médical mais on m'avait laissé libre du sujet. Je revenais des USA, j'avais parlé aux indiens de Taos et Santa Fé, et j'ai raconté cette histoire. J'ai parlé du labo pour situer l'histoire et justifier le titre que j'ai donné. Je m'étais faite copieusement enguirlandée par le directeur médical et....félicitée par le "prof" du stage dans la boite en question.

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