Cet après-midi je suis allée à la ferme chercher mes oeufs; tout se passait normalement, quand, tout-à-coup, sur le petit chemin d'accès où les ajoncs sont encore fleuris,
Il s'est passé un phénomène étrange : une lumière blanche très intense a enveloppé la voiture, m'aveuglant presque; ce fut heureusement très bref, mais je me suis quand même sentie un peu bizarre. Un peu plus loin, le chemin fait un angle de quatre vingt dix degrés et longe le vaste enclos des poules, et là.........j'entendis une voix peu aimable disant : " Que vient-elle faire ici celle-là ? Elle n'a pas le droit ".
Sidérée, je regardais autour de moi, mais, ne vis personne, sauf.........une poule qui me regardait de travers.
Pas possible, je comprends le langage des poules maintenant ? Et j'entendais une espèce de cacophonie à base de claquements de becs. Aux paroles de la peu aimable qui m'avait interpellée, d'autres étaient accourues de tous côtés pour voir de quoi il était question.
Je commençais à vraiment m'amuser quand je remarquais deux poules qui discutaient à l'écart, en me jetant de temps en temps un regard furtif. Je m'approchais discrètement pour les écouter.
* C'est comme je vous le dis, Madame Clouque, les humains sont confinés, comme certaines de nos soeurs.
* Pas possible Madame Kokott, vous êtes sûres de ce que vous dites ?
* Absolument Madame Clouque, et si vous voulez mon avis, c'est bien fait pour eux.
* Oh pour ça oui, Madame Kokott, c'est une race tellement arrogante et prétentieuse, comme cela ils comprendront peut-être le mal que cela fait à nos soeurs d'être confinées. Mais ici, nous vivons en liberté, alors, les humains qui nous gardent, sont-ils punis aussi ? Ce ne serait pas juste !
* Oh ! Laissez tomber ces bons sentiments Madame Clouque, c'est votre récente maternité qui vous a ramollie ? tant pis pour eux, le seul fait d'être humains suffit à les rendre détestables.
Holà ! Vous exagérez ! n'ai-je pu m'empêcher de dire.
Entendant ces mots, les deux commères se déchaînèrent contre les humains en général et moi en particulier. Je reçus une belle algarade.
Finalement, ce n'est pas très intéressant de comprendre le langage de ces idiotes de poules. Qu'elles pondent des oeufs, c'est tout ce qu'on leur demande, et je ne me privais pas de leur dire.
C'est alors que la première qui avait fait une réflexion à mon arrivée, se mit à rameuter ses compagnes; je l'entendais vitupérer contre moi, en me promettant une mémorable raclée.
Mais, heureusement pour moi, les autres étaient occupées à picorer quelques vers de terre et elles dirent que je ne les intéressais pas et qu'on les laisse manger tranquilles.
Ouf ! Me dis-je, tant mieux car cela doit faire mal un bec de poule en colère.
Mais en bonne humaine, je voulais avoir le dernier mot, alors je leur lançais ironiquement.
" Vous savez quoi ? Ce soir je vais manger du confit de poule. Au-revoir Mesdames ! "
Sur ce, je tournais les talons et allais chercher mes oeufs.