J'aime les déserts, ils m'ont toujours fascinée.
Le premier que j'ai connu est le Sahara, (pour moi le plus beau), d'abord par la géographie, puis les lectures, et enfin, j'y suis allée. La première fois par l'Algérie, au début des années soixante, un peu avant l'indépendance, quand je faisais fonction d'interne, (FFI), à l'hôpital de Beni Messous, non loin de la forêt de Baïnem ( brûlée), au sud d'Alger.
Ghardaïa, la mystérieuse mozabite, en fut pour moi la porte. Cette ville me faisait rêver, sans doute à cause de la légende qui explique sa fondation :
* Une belle jeune fille du nom de Daïa, vivait seule dans une grotte, ghar, en arabe. Un jour, un beau et noble jeune homme passant par là, aperçut la jolie Daïa et, instantanément, en tomba amoureux. La belle, elle aussi, fut séduite par ce bel inconnu. Comme dans les contes de fées, ils se marièrent, eurent sans doute beaucoup d'enfants pour peupler la ville qu'ils venaient de fonder : Ghardaïa, la grotte de Daïa.
De là, on prend la piste d' In-Salah, et le désert va s'offrir à nos yeux. Ma première impression fut ces dromadaires, immobiles, apparemment seuls dans cette immensité figée, dont j'imaginais le regard perdu dans l'infini qui se profile devant eux, alors qu'apparaissent au loin, les premiers ergs.
Mais alors...le désert n'est pas si désert ! Des animaux y vivent, et, à part les dromadaires, pour qui j'ai une tendresse particulière, pas forcément des plus sympathiques, comme par exemple, cette charmante vipère à cornes que je suis ravie de ne pas avoir rencontré personnellement.
Par contre, les scorpions.......et je ne parle pas du petit scorpion noir à queue jaune que l'on trouve à Bordeaux.
Mais le désert peut présenter un visage plus souriant. Je me souviens d'une vieille dame rencontrée à Alger, et qui me disait avoir vu, dans sa jeunesse, fleurir le désert. Je l'enviais beaucoup.
Et un jour, le miracle s'est produit, normal, j'étais dans le désert de Judée, Oh non, je n'ai pas vu comme elle, le désert fleurir, mais l'ami israélien qui me servait de guide, m'a montré quatre fleurs qui m'ont époustouflée car je pensais qu'on ne les trouvait que dans les jardins. Ma photo, trop abimée et en noir et blanc, est remplacée par celle-ci, qui n'est pas de moi.
Quatre iris violets, couleur de la méditation. Car, en réalité, le désert c'est cet infini du ciel et de la terre, où l'on finit par se retrouver seul avec soi-même dans une interrogation sans réponse. Un univers métaphysique qui transcende ou écrase.
Je me souviens y avoir un jour traîné une amie. J'avais réussi, je ne sais comment, à lui faire accepter une balade de trois jours dans le Grand Erg Oriental.........à dos de dromadaire. Elle avait mis longtemps à me pardonner. Ah ! les Parisiennes !
De suite elle avait ressenti de l'angoisse. Cette immensité, cet infini du ciel, lui avaient procuré un malaise réel. Elle s'était sentie écrasée..........et avait gâché mon plaisir !
Et moi qui lui avais vanté cette expansion du moi, cette impression de participer à l'univers entier, de toucher du doigt la Création et de vivre le premier matin du monde!!!!
Comment ne captait-elle pas ces vibrations des caravanes disparues, celles des méditations des hommes du désert, au pas lent de leurs dromadaires, qui flottaient dans cet air surchauffé de la journée saharienne ? ( mais la nuit......brrr.....ce que j'ai eu froid !)
Illusion peut-être, mais pour moi, le désert appelle à la transcendance, à cette spiritualité qui n'habitent plus notre civilisation agonisante. Le Judaïsme et l'Islam ne sont-ils pas nés dans le désert ? Le désert incite à l'introspection, à la recherche de soi ou de ce jumeau qui, tel celui de Mani, n'est en réalité que la part de lumière que chacun a en soi, et qu'on a laissé s'éteindre parce qu'on ne sait plus l'écouter dans notre vertige de démiurges qui ont remplacé l'idée, vraie ou fausse qu'importe, de D.ieu par la technologie.
Allez, je reviens sur terre et vais courir avec mon chien. Mais........si les dromadaires me donnaient raison ! Je pense à celui-ci, debout, immobile, le regard perdu dans un horizon où le ciel et la terre se noient ensemble. N'est-il pas en train de méditer ? Sur la folie des hommes peut-être ?