Nous avons atteint Ascain, dernière étape de notre périple basque, en début de soirée.
La route venant de Sare, fait irruption sur la place de l' église avec son massif clocher-porche.
Il semble si lourd, que l' église entière parait s' enfoncer dans un sol qui ne peut plus supporter un tel poids.
Cette église doit d' être encore debout, à la générosité de Napoleon III, qui, passant par Ascain, s' émut de son état et en ordonna la réfection sur ses propres deniers.
Il fit aussi percer une des rues principales de la commune, bien sûr bordées des belles maisons labourdines.
L' Histoire a infligé ici de nombreuses blessures.
Au XVIème siècle, la sorcellerie, très active, fut violemment réprimée par un envoyé du parlement de Bordeaux : Pierre de Lancre, qui commit les pires atrocités.
Au XVIIème siècle, les Espagnols ravagèrent la région. Ascain fut pillée et presque entièrement brûlée.
Vingt ans plus tard, une guerre civile, qui dura deux ans, secoua la ville.
Puis se fut la Révolution et la guerre contre l' Espagne. Ascain eut sa population déportée dans les Landes. A son retour, il n' y avait que désolation et destruction.
Enfin, dernier outrage, les Espagnols et les Portugais la mirent à sac, après la défaite des armées napoleoniennes à Vittoria.
Et Ascain retrouva sa beauté, les couleurs joyeuses de ses maisons, la majesté de la Rhune qui semble à nouveau veiller sur elle.
Ascain, ses placettes et ses rues tranquilles;
Ses grandes demeures chaleureuses, dans lesquelles on suppose des meubles bien cirés.
Pour tout cela, Ascain a attiré de nombreuses célébrités, et, celles-ci lui ont donné un petit côté mondain que n' ont pas ses soeurs labourdines.
Têtes couronnées, tels Napoleon III et l' impératrice Eugénie; le prince russe Théodore Romanoff, qui vécut ici ses dernières années, après avoir, avec le prince Youssoupov, organisé l' assassinat de Raspoutine.
Winston Churchill, à la fin de la seconde Guerre Mondiale, venu là pour en oublier les soucis, et la peindre en aquarelle.
Le Général De Gaulle, venu rendre hommage à tous ceux qui s' étaient évadés pour rejoindre Londres et la France Libre.
Et n' oublions pas Pierre Loti, qui arpenta le pays basque, se joignit à des expéditions de contrebandiers, ( mon rêve ), à travers les sentiers secrets de la montagne, et qui écrivit " Ramuntcho " faisant ainsi connaître la région au monde entier.
Enfin, l' ancien maire de Bordeaux, Jacques Chaban-Delmas, qui venait fidèlement dans sa propriété au flanc de la Rhune, d' où il pouvait sans doute contempler les toits rouges de la ville,
et qui aimait tellement Ascain, qu' il décida d' y passer son éternité.