Le XVIIIème siècle a vu se multiplier les jardins dits "philosophiques". Quand on s' y promène, on le fait aussi parmi les choses de l' esprit. Leur construction était fille d' une idée.
Cette année, le printemps a démérité, laid et pluvieux. L' été est apparu du jour au lendemain très chaud, puis, depuis quatre ou cinq jours, anormalement, le phénomène inverse s' est produit. Cette brutalité climatique a, je crois, rendu fous les jardins.
Ne sachant plus à quelle saison se vouer, les plantes ont poussé n' importe comment, et le jardin philosophique que j' ai visité cette semaine, aurait désespéré celui qui l' avait inspiré : Jean-Jacques Rousseau.
Il y règne une joyeuse anarchie, qui, cependant, n' est pas sans charme. Entrons.
Moi qui n' aime pas les jardins trop ordonnés, me voilà comblée par ce foisonnement de plantes qui vont dans tous les sens, envahissant les allées qui deviennent presque invisibles.
Le jardinier était en vacances au mois d' août, et les plantes, connaissant l' adage " quand le chat n' est pas là........", s' en sont données à coeur-joie.
Ces plantes indisciplinées semblent danser joyeusement, pourtant, une rose me parait être très triste, et même, quelques larmes coulent sur sa joue de velours.
Elle est tellement esseulée.
Tout près d' elle, de jeunes écervelées font la sarabande;
Elles devraient se méfier, car elles énervent tant les grenades, que celles-ci se demandent si elles ne vont pas aller s' éclater parmi elles pour les faire cesser.
D' autres plantes, qui ressemblent à des chardons, ont décidé de ne pas se mêler de ce désordre, elles sont dignes et raides au-dessus de toutes ces folles.
Et que font ces pauvres zinnias au milieu de ces vendangeuses qui ont peut-être déjà anticipé la récolte !
Celui-ci a pourtant l' air si raisonnable! Un brin ahuri peut-être ?
Les arbres, les fleurs, les herbes, ont proclamé leur indépendance je crois;
Mais oui, mais c' est bien sûr !!! Au XVIIIème siècle, la Liberté entamait sa marche triomphale, et aujourd'hui, les circonstances étant favorables, le jardin tente sa révolution.
Un dahlia, tout échevelé, a du trop danser la carmagnole.
Non contente de s' être laissée outrageusement effeuillée, une marguerite jaune est maintenant la proie d' un..... quoi ? Hanneton ?
Et celle-là qui grimpe aux arbres !!!
Oh ! Mais on a l' air de chuchoter un complot par ici !
Je pense qu' il est temps que revienne le jardinier, quand à moi, je décide de revenir au printemps prochain,
quand, dans ce jardin, on ne confondra plus exubérance et folie.