Il est là, l' air nonchalant, l' oeil faussement indifférent, comme un baron perché, ( quel toupet ! ), sur le toit de ma voiture.
Quel Italo Calvino félin lui a inspiré ce goût des positions élevées ?
Il est le plus beau de tous les chats qui viennent dans notre jardin, du moins dans la partie non clôturée, où, ils savent bien qu' ils ne rencontreront pas Victor le Chien.
D' ailleurs, où est' il celui-là ? Ah ! il fait attention à mes affaires !!! Je comprends, il fait la sieste.
Quel impudique ce chien !
Je reviens vers le chat. Oh ! mais le voilà soudain sur le qui-vive ! Les oreilles se dressent, le regard se fait aigu.
Que se passe t' il ? Je suis un peu bousculée devant la porte-fenêtre de la salle-à-manger, et, j' entends un grognement continu.
Victor le Chien est là; il regarde et rouspète. Je suis rassurée, mon chien a du flair et l' atavisme s' exprime en lui.
Le chat a capté la présence de l' ennemi héréditaire; il le fixe de ses yeux bleus, dans lesquels se devine une pointe de défi.
C' est malin un chat ! Je crois qu' ils ont en eux une sagesse immémoriale. Le chien est fougueux et intrépide; le chat analyse et réfléchit.
Celui-ci a vite compris que les vociférations de Victor se heurtent aux vitres de la porte-fenêtre. Il sait aussi que nous n' ouvrirons pas, et qu' il ne risque rien.
Alors, dédaigneusement, il se détourne,
et
reprend cette méditation millénaire qui lui donne l' air si énigmatique.
Mais, Victor le Chien est horriblement vexé de cette indifférence aux menaces qu' il proférait si rageusement. C' est un véritable outrage; alors, il ne se retire pas sous sa tente comme n' importe quel chef de guerre humain, mais, dans son couffin, d' où il nous regarde d' un air si mauvais, que nous décidons de le laisser tranquille, des fois qu' il voudrait venger sur nous son orgueil meurtri.
Quand au chat, je le soupçonne fort d' avoir passé sa patte derrière son oreille, car il est anormal qu' il
pleuve autant. Il nous manifeste ainsi, avec ironie, sa supériorité.