Je trouve les forêts d' hiver belles et mélancoliques.Les grands pins paraissent noirs sur un fond de ciel dont le bleu se teinte de lividité et de gris porteur d' eau.
J'aime aller me promener et arpenter ces coulées de sable qui entaillent la forêt, que bordent les fougères roussies par l' été défunt et les houx qui se parent de petites perles rouges.
A première vue, la forêt a l' air assoupie, mais il ne faut pas se fier à ses airs de Belle au Bois Dormant, toute une vie secrète vibre, cachée dans ce fouillis de branches mortes,d' arbres naissants, et de feuilles finissant leur vie en tapis de sol.
Je sais qu' il y a des sangliers et des renards dans ces bois.J' y ai vu un renard roux, une fois, il y a longtemps, quand j' avais encore la chance de me promener avec mon Père, et des faisans, il y a moins longtemps, quand j' avais encore la chance de me promener avec ma Mère.
Et il y a des champignons.Ils font croire qu' ils sont la seule forme de vie qui subsiste dans cette forêt de l' hiver.Le temps est toujours doux, il a plu, ( enfin ! disent les paysans qui désespéraient de la voir revenir après ces longs mois pendant lesquels elle les avait abandonnés), alors, ils sortent le bout de leur chapeau et mettent de la couleur sur la mousse verte et les feuilles mortes.
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Certains perdent même la tête et se retrouvent "patte en l' air". Est-ce une rupture amoureuse avec le champignon d' à-côté qui l' a mis dans cet état ?
Alors je vais être discrète et m' éloigner doucement; mes pas
vont s' ajouter aux traces des sabots des chevaux dont les cavaliers aiment chevaucher dans ces bois. Je hume encore ces senteurs d' herbe mouillée, de sable humide, toutes ces fragrances
mélangées dans le jour finissant.